Résumé
Les circonstances : depuis 1636, la France et l'Espagne se disputent l'hégémonie européenne dans une guerre sans merci. Les deux Etats ont la même religion, le même régime politique et social ; les deux rois ennemis sont doublement beaux-frères ; les officiers qui se font face sont souvent proches les uns des autres par le sang ou les alliances, l'amitié, les conceptions de la vie...Ils s'entretuent quand même. Corneille, lui, après deux ans de silence, écrit Horace et le dédie à Richelieu. Horace est une oeuvre de guerre. La pièce : Entre Albe et Rome, c'est la même lutte fratricide au nom de l'honneur, de "l'ambition de commander aux autres". Corneille y exalte le courage physique et moral, le dévouement absolu à la patrie, la raison d'Etat. Mais il ne farde rien. Il crée trois personnages complexes et saisissants : Horace, le héros qui devient criminel. Admirable à coups sûr par sa rigueur logique, sa certitude que pour bien agir il faut agir avec tout soi-même, son effort total pour se mettre au niveau de la tâche qu'il assume ; mais haïssable au même degré par son fanatisme, son culte de l'obéissance aveugle. Curiace, le guerrier déchiré qui fait perdre son pays : tendre, compréhensif, "humain", dont les conceptions sont incontestablement supérieures sur presque tous les points à celles de son rival, mais qui n'arrive pas à choisir. Camille enfin, digne soeur d'Horace et la seule capable de le battre, lui prouvant par "d'infaillibles marques" que l'amour comme la patrie peuvent susciter le sacrifice total de soi. Et Corneille réussit encore à placer au dessus de ces trois héros un patriarche qui finalement les domine tous : le vieil Horace, d'une force de sincérité tellement poignante qu'il parvient à paraitre et à reste véritablement humain malgré les affirmations les plus odieuses, à demeure dans notre souvenir comme l'une des plus belles incarnations de l'amour paternel. L'oeuvre la plus engagée de Corneille se trouve ainsi, paradoxalement, celle où il démysthifie le plus la gloire, celle où il nous fait le mieux comprendre dans tous les personnages, malgré les apparences, le prenier devoir de l'homme : rester un homme.
Auteur
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Né en 1606 à Rouen dans une famille de moyenne bourgeoisie, Corneille connaît très tôt le besoin impérieux d'ascension sociale. En effet, passionnément épris de la jeune Catherine Hue, il ne peut l'épouser faute d'une dignité suffisante. Deux offices achetés en 1628 font de lui un avocat chargé de défendre les intérêts du roi et qui pourrait en être récompensé par l'anoblissement. Mais c'est grâce au succès du Cid que Corneille reçoit en 1637 son quartier de noblesse. En 1641, Richelieu intervient pour favoriser son mariage avec une jeune aristocrate, Marie de Lampérière. Mais, en 1664, Louis XIV révoque les lettres de noblesse accordées depuis 1630. Et ce n'est qu'en 1669 que Corneille obtient enfin confirmation de son anoblissement. Corneille se montre un homme à la piété réelle mais jamais puritaine. Chez les jésuites où il est élevé, il apprend à écrire les vers latins dont le rythme se retrouve parfois dans ses tragédies. C'est là également qu'il découvre le théâtre car les jésuites faisaient fréquemment jouer des pièces à leurs élèves. Son goût profond de la liberté vis à vis de toutes les règles théâtrales et la souveraineté de ses personnages sont hérités de la morale moliniste, morale de la volonté individuelle, en opposition au modèle janséniste de la grâce. Cette liberté d'esprit l'oppose aux tenants de la bienséance et le pousse à condamner les menaces rigoristes contre le théâtre d'un Nicole ou d'un Bossuet. Il a des amis libertins mais ne rejoint jamais le cercle des libres penseurs, trop respectueux pour cela des valeurs chrétiennes et du pouvoir royal. Toute sa vie, Corneille mène une double carrière d'avocat et d'auteur dramatique. En quarante-cinq ans d'une carrière théâtrale commencée brillamment à 23 ans, il écrit plus de 30 pièces et connaît sous Louis XIII et la Régence une gloire que le règne de Louis XIV va progressivement ternir. Richelieu le protège, lui accorde une pension, prend sa défense dans la querelle du Cid, et l'anoblit. Toujours fidèle à l'autorité royale, au moment de la Fronde, Corneille remplace au pied levé le procureur de Normandie, passé du côté des frondeurs, tout en manifestant dans Nicomède sa sympathie pour Condé. Mazarin et les princes révoltés se montrent tout aussi peu reconnaissants à son égard. Il se retire alors du monde théâtral pour traduire L'Imitation de Jésus-Christ. Grâce à quelques mécènes protecteurs, dont Fouquet, il revient à la scène pour connaître quelques années d'apogée: une édition in-folio (format réservé aux Anciens) de ses oeuvres paraît en 1664, manifestant sa consécration. Louis XIV le dote, comme tous les gens de lettres, en 1663 mais oublie de lui verser sa pension. Le roi espère par sa politique de mécénat inféoder les auteurs, mais Corneille est trop indépendant et trop peu à la mode pour demeurer un phare à la cour du Roi-Soleil. Bientôt on lui préfère Racine et on ne le reconnaît plus que comme le "vieux Corneille", auteur vénérable mais tombé en désuétude. Il meurt en 1684 à l'âge de 78 ans.
Auteur(s) : Pierre Corneille
Caractéristiques
Editeur : Saga Egmont French
Auteur(s) : Pierre Corneille
Publication : 1 avril 2022
Support(s) : Livre audio [MP3]
Protection(s) : Aucune (MP3)
Taille(s) : 34,9 Mo (MP3)
EAN13 Livre audio [MP3] : 9782821111486