Solidarités ouvrières (1). Sociétaires et compagnons dans les associations coopératives, 1831-1900

L’ouvrage avait été d’abord conçu pour couvrir les cent cinquante ans qui s’étendent entre le premier projet — français buchézien — d’une association coopérative ouvrière (1831), et la concélébration de ce cent cinquantenaire au XXVIe Congrès des Sociétés coopératives de production (Vichy, juin 1981). La matière s’est avérée si copieuse, que seule une première séquence (1831-1900) se trouve restituée dans ce premier tome ; le second (1900-1981) étant en préparation avec, comme fil directeur, auscultations et dépouillements des 26 Congrès d’abord de la Chambre consultative, ensuite de la Confédération des S.C.O.P. Pour cette première période, le traitement organise cette traversée du siècle autour des triennats les plus intenses et, en ce sens, « les plus longs » encourus par les Associations ouvrières, triennats où alternent — et parfois se combinent — les pratiques en lesquelles elles s’attestent, et les pratiques où elles se trouvent contestées. Le décryptage de ces péripéties s’arc-boute sur l’exhumation de textes fondamentaux, paradoxalement voués aux oubliettes. Il n’existait pratiquement pas — ou plus — une histoire de cette forme d’association. En un moment où se multiplient les rhétoriques sur l’autogestion, il était important — au-delà des mots et étiquettes — de rejoindre les choses et d’atteindre la marchandise. Or, pendant un siècle et demi, toute une tradition ouvrière, voire une ethnie sociale de « sociétaires et compagnons », a multiplié les expériences pour tester — sous d’autres et diverses étiquettes — quelque chose comme une auto-gestion qui soit et crédible et fiable. Ces expériences prennent dès lors la valeur d’une certaine expérimentation pour ce que, de plus en plus, on nomme paradoxalement les « libres entreprises collectives »... parties prenantes et composantes dans un Tiers secteur d’économie sociale. « Nos enfants croiront avoir de l’imagination, ils n’auront que des réminiscences », écrivait Saint Simon au début de ce XIXe siècle. En désoccultant cet afflux de réminiscences, l’ouvrage propose, du même coup, une désinhibition dans une imagination sociale en quête d’alternatives, qui soient et crédibles et fiables.