Dans une société secouée par les prises de parole du mouvement #MeToo, les mots « transmission » et « féminisme » prennent une résonance nouvelle. Peut-on réellement transmettre le féminisme comme une valeur familiale ? Quels modèles les mères donnent-elles à leurs filles — volontairement ou malgré elles ? C’est à ces questions complexes et intimes que répond le recueil De mères en filles – 10 récits de transmission féministe à l’ère de #MeToo, dirigé par Camille Abbey.

Rassemblant dix autrices engagées et reconnues — parmi lesquelles Ovidie, Doan Bui, Pauline Harmange ou encore Sophie Astrabie — cet ouvrage choral livre des histoires personnelles et puissantes. Chacune, à sa manière, questionne les liens entre générations de femmes, entre mères souvent modelées par des normes anciennes, et filles élevées dans un monde en pleine mutation.

Ce recueil ne cherche pas à donner une définition unique du féminisme transmis : il en dévoile la complexité, les contradictions et les fractures, mais aussi la force et l’émotion.

Transmettre le féminisme, une évidence ?

Peut-on hériter du féminisme comme d’un patrimoine moral ? Pour certaines des autrices, c’est un refus qui devient moteur : l’absence de modèle féministe chez leur mère les pousse à tracer une autre voie. D’autres racontent des mères fortes, inspirantes, mais aussi ambivalentes, tiraillées entre injonctions sociales et désirs d’émancipation.

Dans Mère modèle, Sophie Astrabie explore l’idée d’une perfection maternelle difficile à déconstruire. Aurélia Blanc, dans La Balance, parle de la colère et du poids du silence. Ovidie, elle, dans Au nom de l’art et de la culture, interroge les violences subies dans les milieux prétendument progressistes.

Tous ces récits convergent vers une même interrogation : comment élever sa propre fille (ou son fils) sans reproduire ce que l’on a soi-même combattu ?

L’intime comme terrain de lutte

Ce qui rend De mères en filles si percutant, c’est sa manière de politiser l’intime sans le caricaturer. Chaque récit creuse un pan de la maternité, de la filiation, de l’histoire familiale, en croisant ces expériences personnelles avec les enjeux sociétaux de notre époque : sexisme ordinaire, injonctions à la maternité, violences sexuelles, tabous du corps, éducation genrée…

L’écriture est tantôt douce, tantôt brutale, mais toujours honnête. Le recueil aborde aussi des expériences moins souvent représentées, comme la maternité transitoire (Soudain, j'avais un fils de Maaï Youssef) ou la parentalité artistique (Trois fois septembre de Léa Todorov). On y lit la solitude des mères féministes, la culpabilité, les incompréhensions, mais aussi les complicités naissantes entre mères et filles.

Ce n’est pas un manifeste : c’est un miroir tendu à toutes les femmes, pour reconnaître leurs blessures, leurs luttes, leurs espoirs.

Une lecture intergénérationnelle, féministe et libératrice

À l’ère post-#MeToo, De mères en filles se pose comme un ouvrage essentiel pour penser les nouvelles formes d’émancipation. Car le féminisme n’est pas figé : il se réinvente, se confronte aux héritages, se débat avec les contradictions du quotidien.

En cela, le livre résonne bien au-delà du cercle familial. Il parle à toutes les personnes qui, un jour, ont interrogé leur rapport à leur mère, à leur enfant, à leur corps, à leur place dans la société. Il s’adresse aux militantes, aux mères hésitantes, aux filles en colère, aux lectrices curieuses… et à tous ceux qui veulent comprendre ce que signifie « être une femme » aujourd’hui.

Pourquoi lire De mères en filles ?

Ce recueil offre une lecture riche et sensible pour mieux comprendre les enjeux de la transmission féministe :

  • 10 récits authentiques, écrits par des autrices engagées

  • Une diversité de vécus : maternité choisie ou non, lien filial complexe, héritage culturel

  • Une réflexion profonde sur le féminisme post-#MeToo

  • Une écriture intime et accessible, qui touche au cœur

  • Un appel à repenser les liens mère-fille sous un prisme féministe contemporain

De mères en filles est un livre à lire seule, à offrir, à discuter. Un texte collectif qui libère la parole, invite à l’introspection, et surtout, donne envie de transmettre autrement.

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