Et si le mal avait un visage… et qu’il était sublime ?
Dans L’étreinte des ombres, Susan Barker — déjà remarquée pour Le Livre des vies antérieures — livre un roman captivant, vertigineux, impossible à lâcher. Traduit par Valentine Leÿs, ce récit mêle thriller psychologique, conte surnaturel et drame contemporain, dans une fresque littéraire envoûtante portée par un personnage féminin aussi insaisissable que destructeur.

Tout commence à l’aéroport d’Osaka, lorsqu’un concours de circonstances pousse Jake et Mariko, deux inconnus, à rater leur avion. Ce qui aurait pu n’être qu’une anecdote anodine devient le point de départ d’un récit fascinant. En partageant un repas, les deux voyageurs découvrent un détail troublant : tous deux ont récemment perdu un proche… et tous deux évoquent la présence mystérieuse d’une même femme avant la tragédie.

Une quête obsédante à travers les continents

Ce n’est pas un hasard si L’étreinte des ombres donne l’impression de lire un film en mouvement : la narration est fluide, nerveuse, toujours en tension. Jake, hanté par cette révélation, décide de se lancer à la poursuite de cette femme dont il ignore tout — sinon qu’elle laisse derrière elle des vies brisées. Ce mystère féminin, au charme surnaturel, incarne une sorte d’archétype du mal moderne : fascinant, charismatique, insaisissable.

De Londres à Shanghai, de Tokyo à Berlin, l’intrigue serpente comme une énigme vivante. Chaque étape est l’occasion de découvrir un nouveau témoin, une nouvelle victime, une nouvelle pièce du puzzle. Et plus Jake avance, plus son obsession croît… jusqu’à risquer de se perdre lui-même dans les ténèbres qu’il tente d’éclairer.

Une réflexion vertigineuse sur le mal et l’image

Sous ses allures de thriller psychologique, L’étreinte des ombres est aussi un roman sur notre époque. La femme poursuivie n’est pas une meurtrière ordinaire : elle est le reflet noir de notre culte de l’image, une créature façonnée par la séduction, le pouvoir et la manipulation. Elle incarne nos pires angoisses modernes : la viralité des faux-semblants, la fascination pour la beauté froide, l’égo qui dévore tout.

Susan Barker utilise ce personnage pour interroger nos obsessions collectives. Pourquoi sommes-nous fascinés par ceux qui nous détruisent ? Pourquoi la beauté diabolique nous attire-t-elle autant que la lumière attire les papillons ? L’autrice n’apporte pas de réponses tranchées, mais tisse un récit où chaque lecteur est confronté à sa propre attirance pour l’obscur.

Une écriture à la fois littéraire et visuelle

La force de ce roman repose aussi sur la plume de Susan Barker. À la fois poétique et incisive, elle alterne descriptions sensuelles et dialogues tendus, scènes de pure tension et moments de contemplation. Ce style unique confère au récit une atmosphère immersive, presque cinématographique. Pas étonnant que le roman soit déjà en cours d’adaptation au cinéma : L’étreinte des ombres a tout pour devenir un grand film noir moderne.

Le rythme s’accélère à mesure que l’on approche de la vérité. Mais peut-on réellement saisir une ombre ? Le danger, ici, n’est pas seulement de croiser cette femme, mais de la regarder trop longtemps… Car ce qu’elle reflète, c’est peut-être nous-mêmes.

Une lecture envoûtante, une traque inoubliable

Avec L’étreinte des ombres, Susan Barker livre un page-turner de haut vol, à la fois addictif, dérangeant et profondément intelligent. C’est un roman sur l’obsession, la mémoire, le mensonge… et le visage changeant du mal. Entre tension psychologique et fable contemporaine, ce livre nous confronte à notre propre fascination pour ce que nous devrions fuir.

Une lecture troublante et nécessaire, qui vous poursuivra bien après la dernière page. Entrez dans L’étreinte des ombres… mais soyez prêts à y laisser un peu de vous.