Quand un simple réveil à l’hôpital devient la porte d’entrée vers une enquête mortelle, c’est que l’on est entré dans un roman de Guillaume Musso. Avec Angélique, l’auteur le plus lu de France propose une nouvelle variation autour de ses thèmes fétiches : la mémoire, le mensonge, l’amour perdu et le poids des choix que l’on ne fait pas.
Ce thriller aux allures classiques déploie peu à peu une mécanique narrative brillante, où chaque page remet en cause la précédente. Dans un Paris de fin d’année, à la fois glacé et crépusculaire, le suspense prend une teinte émotionnelle singulière, entre vertige moral et course contre la montre.
Un duo improbable au cœur de l’intrigue
Tout commence avec Mathias Taillefer, un ancien flic qui se réveille dans un lit d’hôpital, affaibli par un accident cardiaque. Alors qu’il tente de se reconnecter à la réalité, il découvre une jeune femme jouant du violoncelle à son chevet : Louise Collange, étudiante en musicologie, venue offrir un peu de réconfort aux patients.
Mais cette rencontre anodine est un leurre.
Rapidement, Louise lui révèle qu’elle a cherché à le retrouver pour une raison bien précise : elle veut qu’il enquête sur une mort suspecte qu’aucun autre policier n’a voulu creuser. D’abord réticent, Mathias se laisse entraîner, découvrant en chemin que cette affaire pourrait bien toucher à ses propres blessures enfouies.
Ce tandem inattendu donne au récit une dynamique particulière : entre jeux de dupes, tensions sous-jacentes et failles émotionnelles, l’enquête devient aussi introspective qu’investigative.
Une enquête sur les zones grises de l’âme humaine
Dans Angélique, rien n’est jamais totalement noir ou blanc. Musso s’attarde sur la complexité morale de ses personnages, leurs contradictions, leurs choix discutables. Loin du policier traditionnel, le roman explore la manière dont le passé déforme le présent, et comment les regrets peuvent façonner une existence entière.
Les figures qui gravitent autour du duo principal – proches, suspects, témoins – sont autant de miroirs de ce que les protagonistes fuient ou désirent. L’histoire avance dans un climat d’ambiguïté constante, à la manière d’un film d’Hitchcock, où la tension repose autant sur ce que l’on cache que sur ce que l’on dit.
On y retrouve ce que Musso maîtrise à merveille : l’art du twist, du retournement de situation maîtrisé, mais toujours au service de la psychologie et de l’émotion.
Paris, décor hanté et miroir de l’âme
L’intrigue se déroule dans un Paris hivernal, entre les fêtes de Noël et les premiers jours de janvier, un cadre propice à la mélancolie, aux secrets, aux éclairages tamisés. Cette atmosphère n’est pas qu’un décor : elle renforce le sentiment d’étouffement intime qui habite Mathias, comme si la ville elle-même portait les traces des absents et des choix abandonnés.
Musso y injecte des éléments de romance désenchantée, de quête existentielle, tout en menant une intrigue policière tendue. Le titre lui-même, Angélique, interroge le lecteur : est-ce un prénom ? Une figure symbolique ? Une illusion ? Une culpabilité ?
La réponse n’est jamais simple. Et c’est là toute la force du roman.
Une œuvre de maturité dans l’univers Musso
Angélique s’inscrit dans la continuité des précédents romans de Guillaume Musso, tout en proposant une voix plus intime, plus feutrée, plus mélancolique. Loin du simple page-turner, c’est un roman qui interroge la part obscure de chacun d’entre nous : la violence rentrée, les envies inavouées, les vérités que l’on maquille pour continuer à vivre.
Dans cette fiction troublante et prenante, les émotions deviennent armes, et l’amour – ou son absence – peut être aussi dangereux qu’un crime.
Un roman à découvrir pour tous ceux qui aiment les thrillers profonds, humains, et parfaitement menés.



