Angèle pensait trouver refuge dans les montagnes de son enfance. Fuir Paris, ses menaces glaçantes, ses peurs. Pourtant, en revenant dans ce village des Pyrénées à l’occasion de la fête de l’Ours, elle se heurte à un silence plus oppressant encore que ses cauchemars : personne ne semble se souvenir d’elle, pas même ceux qu’elle croyait proches. La Nuit de l’ours d’Alexandra Julhiet nous entraîne dans un huis clos à ciel ouvert, où la vérité se cache derrière les légendes, les non-dits et les murs des vieilles maisons.

La montagne : décor sublime, théâtre des mensonges

Le roman se déroule dans un village isolé des Pyrénées, cadre à la fois majestueux et inquiétant. Les paysages grandioses, la nature brute, la tradition séculaire de la fête de l’Ours… tout contribue à créer une atmosphère à la fois fascinante et oppressante. Alexandra Julhiet exploite avec brio cette dualité : la beauté des lieux contraste avec la noirceur des secrets qui y sont enfouis.

La fête de l’Ours, tradition bien réelle de certaines vallées pyrénéennes, devient sous la plume de l’autrice un symbole troublant. Cette célébration où les hommes se griment en bêtes, où les limites entre proie et chasseur se brouillent, fait écho au parcours d’Angèle : perdue, traquée, incapable de distinguer ses alliés de ses ennemis.

Une héroïne confrontée à l’amnésie des autres

Angèle n’est pas une héroïne intrépide ou surentraînée. C’est une femme ordinaire, fragilisée par les épreuves, en quête de répit. Sa vulnérabilité la rend terriblement humaine et renforce l’empathie du lecteur. Face à un père au passé flou, des habitants amnésiques ou hostiles, et des souvenirs d’enfance qui vacillent, Angèle incarne la lutte pour recoller les morceaux d’une identité fragmentée.

Les menaces anonymes, le miroir embué où s’inscrit la haine, la chambre close de la maison paternelle : chaque élément nourrit le suspense et pose une question lancinante. Est-elle la victime d’un complot ? La gardienne d’une vérité qu’elle-même ignore ? Ou l’intruse dans un monde qui refuse de se souvenir ?

Un thriller psychologique à l’écriture immersive

Alexandra Julhiet signe un roman où la tension monte page après page. L’autrice mêle adroitement les codes du thriller classique – menace, enquête intime, faux-semblants – et ceux du roman d’atmosphère, avec une grande sensibilité pour les lieux et les ambiances. La lente révélation des secrets d’Angèle et de son père tient le lecteur en haleine jusqu’au dénouement.

La Nuit de l’ours est une plongée au cœur des ombres familiales, des traditions dévoyées et de la mémoire piégée. Un récit où le passé rattrape toujours ceux qui tentent de l’oublier.

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