Comment faire parler les morts quand les vivants n’osent plus ? Dans Celui qui revient, Han Kang, autrice coréenne de renommée internationale (La Végétarienne, Dans le blanc), signe un roman brûlant de douleur et d’humanité, où la poésie se fait rempart contre l’oubli. En évoquant le massacre de Gwangju — épisode sanglant de l’histoire sud-coréenne souvent réduit au silence — elle offre une œuvre bouleversante, politique et spirituelle, qui convoque autant les corps que les âmes.
Ce livre n’est pas une reconstitution historique. C’est une procession littéraire, un cortège où les vivants et les morts marchent côte à côte, entre passé et présent, entre hurlement et silence.
Gwangju, 1980 : quand l’Histoire saigne
Printemps 1980. La dictature militaire s’est installée en Corée du Sud. Les manifestations étudiantes s’intensifient, et Gwangju devient le théâtre d’une répression féroce. Des centaines — voire des milliers — de civils, pour la plupart jeunes, sont tués. C’est dans cette ville assiégée que Tongho, adolescent bouleversé, cherche son ami disparu parmi les cadavres. Son errance, entre morgues improvisées, rues désertes et silences complices, devient le fil conducteur d’un deuil impossible.
Autour de lui gravitent des voix entremêlées : celle d’un éditeur qui tente de publier un texte censuré, celle de témoins survivants, et surtout celle des morts eux-mêmes, qui observent, murmurent, refusent d’être effacés.
Han Kang adopte un style choral, fragmentaire, où chaque chapitre devient une fenêtre sur un point de vue, un souvenir, un traumatisme. L’Histoire ne se raconte pas : elle se ressent, dans les corps mutilés, les voix brisées, les rêves fauchés.
Entre poésie et douleur : une écriture incarnée
Ce qui frappe dans Celui qui revient, c’est la puissance sensorielle de l’écriture. Han Kang ne raconte pas la violence — elle la fait vivre. Elle évoque les chairs abandonnées, les regards figés dans la mort, les odeurs de sang et d’essence, mais toujours avec une dignité profonde, refusant la pornographie du trauma.
Sa langue est dense, lente, rythmée comme une prière ou un chant funèbre. Les émotions sont contenues, mais jamais aseptisées. Ce qui reste après la lecture, ce ne sont pas seulement des faits ou des images : ce sont des silences, des tremblements, des respirations suspendues.
Han Kang nous rappelle que la littérature peut être un acte de résistance, un espace sacré où les disparus continuent de parler, où la mémoire ne se fige pas en monument, mais se transmet comme un souffle fragile.
Un roman politique et métaphysique
Celui qui revient est traversé par une tension entre le tangible et l’invisible. L’autrice interroge non seulement la brutalité de l’oppression, mais aussi ce qui reste quand tout est perdu : la culpabilité des survivants, le silence des institutions, les trous béants dans les généalogies familiales, et ce lien mystérieux entre les morts et les vivants.
Certaines scènes, presque mystiques, donnent voix aux défunts eux-mêmes. Han Kang ose faire parler ceux qu’on n’écoute plus, et dans ces passages troublants, elle explore les frontières entre mémoire, imaginaire et spiritualité. Le roman devient ainsi une réflexion universelle sur le deuil collectif, la vérité historique et la dignité humaine.
Pratique : pourquoi lire Celui qui revient
Pour découvrir un pan méconnu de l’histoire sud-coréenne, avec une approche littéraire puissante
Pour une écriture poétique, sobre et incarnée, à la hauteur de la douleur collective qu’elle évoque
Pour un roman choral et profondément humain, où chaque voix éclaire une facette du drame
Pour une lecture engagée et bouleversante, qui dépasse les frontières culturelles
Pour entrer dans un récit qui mêle mémoire, corps et âme, à la manière des grandes œuvres du XXe siècle sur la violence d’État
Avec Celui qui revient, Han Kang signe un livre essentiel, d’une beauté déchirante. Il nous confronte à la brutalité de l’Histoire, mais surtout, il offre une dignité littéraire aux oubliés, et nous invite à les écouter — non pas par devoir de mémoire, mais par nécessité vitale.
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