Il existe des histoires d’amour qui naissent dans la douceur. D’autres prennent racine dans les failles, la douleur, le chaos. Avec Nightcall, Cécilia Armand nous offre une romance brutale et viscérale, ancrée dans un univers où la violence est la norme, et où la tendresse devient un acte de résistance. À travers les trajectoires d’Evenn et de Handel, ce roman interroge notre capacité à aimer quand tout semble nous en rendre incapables, à faire confiance malgré les cicatrices, et à se reconstruire dans un monde qui détruit.

Plus qu’une simple romance LGBTQ+, Nightcall est un roman noir, sensoriel et cathartique, où les thèmes du trauma, de l’identité et de la loyauté sont explorés avec intensité. C’est une œuvre qui ne laisse pas indemne, une plongée dans les recoins les plus sombres de l’âme humaine — mais aussi dans sa lumière la plus inattendue.

Quand la cage devient refuge

Evenn est un survivant. Un homme détruit par une agression subie dans son enfance, un être habité par la colère et rongé par un sentiment d'injustice permanent. Lorsqu’il entre dans l’univers des combats clandestins dirigés par la famille Mathisen, il y trouve une forme d'exutoire, une manière de canaliser sa rage : « se battre pour survivre, se laisser frapper pour exister ».

Dans ce monde sans loi, la cage de combat devient paradoxalement un sanctuaire : un lieu où Evenn peut enfin ressentir quelque chose, même si c’est de la douleur. C’est une métaphore puissante de l’enfermement psychologique qu’il subit : il est à la fois acteur et prisonnier de ses blessures.

Le roman questionne ainsi la fausse sécurité qu’apporte la violence, et la manière dont elle peut anesthésier ou maintenir en vie ceux qui n'ont plus d'autre langage émotionnel.

Une relation forcée, puis salvatrice

Handel, chirurgien de talent mais fils soumis, est contraint d’obéir à la loi du clan familial. Bien qu’il veuille s’extraire du système mafieux, il devient malgré lui le médecin personnel d’Evenn, chargé de soigner ses blessures après chaque combat. Leur relation commence dans la méfiance, la douleur, le rejet.

Evenn refuse qu’on le touche. Handel refuse d’avoir à le sauver.

Mais peu à peu, une intimité naît dans les interstices du silence et des soins, dans cette proximité imposée par les corps meurtris. Leur relation est conflictuelle, électrique, faite de confrontations et de fuites, mais aussi de gestes suspendus, de regards, d’aveux contenus. L’écriture de Cécilia Armand excelle à capter cette tension, entre pudeur et fureur, entre besoin d’amour et incapacité à le recevoir.

La romance qui émerge est brute, inconfortable, authentique. Elle refuse les clichés du sauveur ou du miracle amoureux, pour privilégier la lente émergence d’un lien qui ne guérit pas tout, mais qui rend la survie un peu plus supportable.

La famille comme prison : entre loyauté et libération

Au-delà du couple Evenn-Handel, Nightcall est une critique des systèmes de domination familiaux. La famille Mathisen est une organisation criminelle, mais elle symbolise aussi toutes ces structures d’oppression où l’amour est conditionné à l’obéissance. Handel est le fils qui rêve de liberté, mais dont les chaînes sont invisibles. Même adulte, même brillant chirurgien, il reste prisonnier du pouvoir paternel.

Ce contexte accentue la dimension tragique et politique du roman : ce n’est pas seulement une histoire d’amour contrariée, c’est un combat pour la dignité, l’autonomie, la reconstruction. La violence est omniprésente, mais c’est une violence systémique, sociale, parfois même intériorisée. Ce que Nightcall dépeint, c’est aussi la façon dont la masculinité, la virilité et le pouvoir se construisent dans un rapport destructeur aux émotions.

C’est ce qui rend l’évolution d’Evenn et Handel d’autant plus puissante : leur lien devient un acte de désobéissance, une tentative fragile de se libérer des injonctions familiales, sociétales, et même intimes.

Pratique : comment reconstruire un lien émotionnel après un traumatisme

Voici quelques repères pour apprivoiser l’intimité lorsqu’on porte en soi des blessures profondes

  • Apprendre à reconnaître ses réactions de défense : agressivité, mutisme, évitement

  • Prendre le temps d’installer une confiance émotionnelle sans brusquer les étapes

  • Travailler avec des professionnels du trauma (thérapeutes spécialisés) pour accompagner la guérison

  • Communiquer ses limites, ses besoins, même de manière imparfaite

  • Faire de la lenteur une alliée : la reconstruction n’est pas linéaire, et l’amour peut s’inventer en dehors des modèles normés

Ces gestes simples peuvent devenir des leviers de transformation, à condition d’être partagés dans un espace sécurisant.

Nightcall est un roman dur, mais profondément humain. Il montre que, même dans l’obscurité la plus complète, un regard, un contact, une parole peuvent rallumer une étincelle. C’est un récit d’amour, de rage, et de renaissance. Et surtout, c’est une déclaration : même ceux que tout le monde a abandonnés méritent une seconde chance.

Découvrez Nightcall dès maintenant sur IZIBOOKS !