Entre rêve et piège
Clara a 24 ans. Elle rêve de scène, de texte, d’émotion à faire vibrer sous les projecteurs. Quand sa cousine Salomé lui tend la main et l’invite à Paris pour jouer à ses côtés dans L’Annonce faite à Marie de Paul Claudel, l’opportunité semble tomber du ciel. Un rôle dans une pièce aussi puissante, un tremplin pour percer, une chance rare pour une jeune comédienne encore inconnue.
Mais ce rêve vire rapidement au cauchemar.
Ce qui devait être un duo d’actrices devient un affrontement feutré. Car si Clara interprète Violaine, la sœur douce et lumineuse, Salomé incarne celle qui envie, qui jalouse, qui détruit. Et le théâtre finit par contaminer la réalité.
Un duel psychologique à huis clos
Dans les coulisses, les regards deviennent plus tranchants que les répliques. Salomé, d’abord bienfaitrice, s’immisce dans chaque recoin de la vie de Clara. Insidieuse, elle pousse, manipule, isole. La jalousie s’installe comme un poison lent.
Et Clara vacille. Entre admiration pour sa cousine et blessure profonde, entre confiance et peur, elle ne sait plus ce qu’elle joue… ni ce qu’elle vit. Loin des clichés de la rivalité féminine, Salomé explore la frontière invisible entre l’amour et la destruction.
Agathe Chenevez capte avec justesse l’emprise psychologique, celle qui ne crie pas mais qui ronge, celle qui ne laisse pas de marques visibles mais détruit de l’intérieur.
La scène comme miroir de l’âme
Ce roman n’est pas qu’un drame familial ou un thriller psychologique. C’est aussi une déclaration d’amour au théâtre, à son pouvoir de transformation… mais aussi de révélation. Car L’Annonce faite à Marie n’est pas ici un simple décor : elle agit comme un catalyseur.
Violaine, le rôle interprété par Clara, devient un miroir de son propre parcours. Pure, résiliente, prête au sacrifice, elle offre à Clara un refuge autant qu’une menace. Plus elle s’en imprègne, plus elle s’efface. Son identité devient floue. Est-elle Clara ou Violaine ? Peut-on se sauver en se perdant dans un personnage ?
Agathe Chenevez, qui découvrit Claudel à 13 ans, livre ici une réflexion fine sur ce que signifie incarner un rôle, jusqu’à parfois en perdre pied avec soi-même.
Un premier roman à la maturité saisissante
À seulement 26 ans, Agathe Chenevez impressionne par la maîtrise de sa plume. Chaque page de Salomé respire une tension contenue, un malaise grandissant, une beauté fragile. La psychologie des personnages est ciselée avec une délicatesse rageuse.
On y trouve autant de poésie que de douleur, autant de lumière que de noirceur. L’écriture, sobre mais vibrante, fait naître l’émotion sans jamais forcer, à la manière d’un silence bien placé sur une scène de théâtre.
Les libraires ne s’y sont pas trompés : Salomé est un premier roman coup de cœur, lumineux et bouleversant. Il rappelle que parfois, les plus grandes batailles se jouent en coulisses… et que l’art peut devenir un champ de guerre.
À lire si vous aimez :
Les romans sur les coulisses du théâtre
Les drames psychologiques entre femmes
Les récits de transformation identitaire
Les ambiances feutrées, tendues, à la limite de l’obsession
Salomé d’Agathe Chenevez est disponible sur IZIBOOKS.



