Il suffit parfois d’un rien pour vaciller. Une phrase de trop, une nuit blanche, une solitude trop longue… Et l’on sent que tout pourrait chavirer. C’est précisément ce fil tendu entre la raison et la folie que Guillaume Lavoie explore dans son second recueil Chavirer, une œuvre poétique où le vertige est roi, mais où des refuges inattendus offrent encore des prises.
Dans un monde de plus en plus incertain, la question de l’équilibre mental et émotionnel est devenue centrale. Comment continuer à avancer dans un environnement brutal, absurde, changeant ? C’est cette quête de stabilité — forcément illusoire, mais profondément humaine — que ce recueil illustre avec finesse, humour noir et sensibilité.
Poésie et vertige : écrire pour ne pas tomber
La poésie a cette capacité rare de dire l’indicible, de nommer ce que la prose échoue souvent à exprimer. Dans Chavirer, Guillaume Lavoie adopte le ton du funambule existentiel, celui qui avance avec lucidité sur une corde trop fine, tiraillé entre ce qu’il comprend du monde et ce qu’il ressent.
Chaque poème, chaque image, semble né de cette tension : le quotidien qui explose à tout moment, la beauté cachée dans le désordre, l’absurde qui côtoie la grâce. Plutôt que d’offrir des réponses, le poète interroge, confronte, déséquilibre. Mais toujours avec une forme de douceur — ou d’humour discret — qui empêche le désespoir de prendre le dessus.
Dans ce sens, Chavirer n’est pas un cri de détresse, mais un chant fragile sur le fil, une tentative de dire : “Je suis là, encore debout, malgré tout.”
L’absurdité du monde : une réalité à apprivoiser
L’absurde n’est pas ici une posture littéraire, mais une réalité vécue, celle d’un monde où les repères glissent, où les certitudes vacillent. Comme l’a montré Albert Camus dans Le Mythe de Sisyphe, affronter l’absurde sans fuir est déjà une forme de courage. Guillaume Lavoie s’inscrit dans cette lignée : plutôt que de nier l’absurdité, il l’embrasse, et en extrait une poésie brute, nue, parfois drôle, toujours sincère.
Le recueil fait ainsi écho à nos propres oscillations : entre espoir et cynisme, entre désir d’agir et besoin de se retirer. Il donne à lire une sensibilité contemporaine marquée par l’incertitude, mais encore capable de chercher — et de trouver — des îlots de sens.
Les refuges dans le chaos : humour, nature et humanité
Dans ce monde bancal, il faut des points d’appui. Le recueil en propose plusieurs, esquissés avec délicatesse : la cime des arbres, la mer, les souvenirs, l’amour maladroit, une conversation, un silence plein. Il y a aussi l’humour, pince-sans-rire, qui permet de tenir à distance la peur ou l’absurde.
Ces refuges ne sont jamais grandiloquents. Ce sont des replis du quotidien, des instants presque invisibles, que seule la poésie peut magnifier. Ils sont les accroches qui empêchent le corps — et l’esprit — de sombrer.
Dans ce geste d’écriture, il y a une forme de solidarité. Le poète ne dit pas : “Regardez comme je souffre”, mais plutôt : “Vous aussi, vous sentez ça, non ? Alors, cherchons ensemble des issues.”
Comment cultiver son équilibre personnel dans un monde instable
Le message implicite de Chavirer, c’est qu’il n’existe pas de stabilité absolue — mais qu’il est possible d’apprendre à danser avec l’instabilité. Voici quelques idées concrètes inspirées de cette démarche poétique :
S’autoriser à nommer ses déséquilibres au lieu de les cacher
Trouver des micro-refuges personnels : un lieu, un texte, un rituel
Pratiquer un humour discret pour désamorcer les tensions internes
Observer les détails du quotidien avec un regard poétique
Lire — ou écrire — de la poésie pour réapprendre à ressentir
Ces pratiques ne résolvent pas tout, mais elles aident à habiter l’incertitude sans s’y perdre complètement.
Une poésie lucide, tendre et terriblement humaine
Avec Chavirer, Guillaume Lavoie nous offre une poésie de la survie douce, qui ne nie pas le chaos mais choisit de le traverser avec style, lucidité et une pointe de malice. Ce recueil s’adresse à tous ceux qui avancent sur la corde raide, avec ou sans filet, et qui cherchent dans les mots un point d’équilibre.
C’est une lecture qui rassure autant qu’elle remue, une invitation à accepter notre humanité bancale, sensible, mais debout.
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