Citroën et le "Citroënisme" : une saga industrielle entre innovation, mythe et mutation

Avec Citroën and Citroënism, Joël Broustail retrace l’histoire fascinante de Citroën, entre innovations audacieuses, bouleversements industriels et culte automobile français.


La Citroën DS. La 2CV. La Traction Avant. Ces modèles cultes font partie de l’imaginaire collectif français, bien au-delà du simple monde de l’automobile. Mais que cache vraiment la trajectoire de cette marque singulière, à la fois innovante, visionnaire et pourtant malmenée par l’histoire économique ? C’est à cette question que répond Joël Broustail dans son ouvrage Citroën and Citroënism, une analyse historique transversale, rigoureuse et profondément éclairante.

De la naissance d’André Citroën à l’absorption par PSA, puis Stellantis, l’auteur retrace plus d’un siècle d’industrialisation, d’utopie technologique et de tensions économiques, en s’appuyant sur une documentation impressionnante. Mais plus qu’une simple chronique industrielle, ce livre propose une lecture culturelle et politique de ce qu’il nomme le "Citroënisme" : une forme particulière de fascination pour l’automobile, emblématique du XXe siècle.

Une figure fondatrice : André Citroën, l’industriel visionnaire

Tout commence avec André Citroën, né en 1878. Formé à l’École polytechnique, influencé par les méthodes de production américaines, il rêve de modernité et de diffusion massive. Dès les années 1920, il introduit en France le fordisme, le marketing agressif, et une vision quasi messianique de l’automobile comme vecteur de progrès social.

Sous sa direction, Citroën devient un laboratoire d’innovations mécaniques, commerciales et sociales : première voiture à traction avant, premiers financements à crédit, premières campagnes publicitaires massives… La marque devient une légende, et son fondateur, une figure à la croisée du capitalisme industriel et de l’utopisme.

Mais comme le montre Broustail, cette audace se paie. Mal gérée financièrement, trop avant-gardiste parfois, Citroën s’effondre en 1934. Le groupe est repris par Michelin, dans un contexte de crise économique et de montée des périls politiques.

Du rêve technologique à la gestion pragmatique : l’ère Michelin et PSA

L’ouvrage met en lumière le contraste saisissant entre la période André Citroën (jusqu’en 1935) et la gestion Michelin (1935–1974), plus rigoureuse mais aussi plus conservatrice. Malgré des succès majeurs comme la 2CV ou la DS, Citroën reste en tension constante entre innovation produit et fragilité financière.

Puis vient la fusion avec Peugeot, en 1976, qui voit peu à peu l’effacement de l’identité Citroën au profit d’une rationalisation industrielle. Ce processus atteint son paroxysme dans les années 2000, jusqu’à l’intégration dans le groupe Stellantis.

Pour Broustail, c’est la dilution d’un mythe : celui d’une entreprise dont l’ADN reposait sur l’audace, la différence et le culte de la singularité technique, remplacée par une logique de standardisation.

Le "Citroënisme" : une religion automobile ?

L’un des apports les plus originaux du livre est la conceptualisation du "Citroënisme", que Broustail présente comme une forme d’adhésion émotionnelle et culturelle à une marque qui dépasse l’acte d’achat. À l’instar des "apple-addicts", les passionnés de Citroën voient en la marque une philosophie de vie, une forme d’ingéniosité française, parfois marginale, mais toujours imaginative.

Ce culte, qui culmine avec des modèles comme la DS ou la SM, reflète une époque où l’automobile était bien plus qu’un outil : un symbole de liberté, d’élégance, et de modernité.

Une réflexion sur l’innovation et l’avenir industriel européen

Au-delà du récit, Citroën and Citroënism soulève des questions fondamentales sur la place de l’innovation dans l’économie contemporaine, notamment en France et en Europe. Comment continuer à innover dans un environnement mature, contraint par la durabilité, les réglementations et les exigences sociales ? Faut-il sacrifier l’audace au nom de la rentabilité ? Quel équilibre entre liberté entrepreneuriale et bien commun ?

Dans un monde en pleine transition écologique et numérique, Broustail plaide pour une économie de l’innovation repensée, plus responsable mais tout aussi ambitieuse.

Une lecture essentielle pour passionnés, chercheurs et décideurs

Avec sa double expertise en histoire et en management, Joël Broustail offre un regard unique sur l’histoire de Citroën, mêlant récit vivant, analyse stratégique et portée philosophique. Loin d’un simple ouvrage automobile, Citroën and Citroënism est un essai riche et documenté, accessible mais exigeant, qui passionnera autant les amateurs de voitures que les curieux de l’histoire industrielle française.

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